Il y a plus d'une année maintenant, c'est ce mot que tu as prononcé à mon encontre... Autour de moi, tout s'est écroulé... Il y a eu une première douleur, celle du "pourquoi", restée sans réponse; suivie de près par celle du "plus jamais"...
Ma vie avait basculé... Tout était à recommencer... Tout avait changé... Même la rose n'avait plus le même parfum, même mes larmes ne soulageaient plus ma douleur, même le plus beau des rêves avait perdu son charme... La vie : noire, sombre, monotone, sans intérêt...
Je n'avais pas le courage de me battre, pas le courage de tout affronter, pas le courage de tout recommencer... Il me restait l'espoir, l'espoir d'un retour impossible, mais plus le temps passait, plus l'espoir s'envolait... Comme pour pouvoir échanger ma douleur contre cet espoir, c'est mes veines que je tranchais... Mon poignet, mes bras, mon torse, mon dos... Mais c'était illusoire, on échange pas du sang contre des pensées... Je l'ai compris au fil du temps...
Je n'avais plus rien à perdre... Alors, c'est vers toi que je suis retournée... Tu ne voulais pas me voir, pourtant, j'ai pu vider mon sac, là, à tes pieds... Je t'ai tout demandé, mes dernières interrogations, tes pensées à mon égard, sans plus aucune limite... De toute façon, tout était terminé... Je t'ai quitté en te disant "adieu", qui pour moi, signifie "plus jamais"...
Voilà... J'étais prête, mes comptes étaient bouclés... Pourtant, je n'étais pas pressée, pour la permière fois depuis trop longtemps, j'étais bien, je souriais même, car je connaissais la suite de cette histoire... Il me restait quelques sous au fond d'une poche, je trouvais bête de les garder... Toujours avec le sourire, je suis rentrée au bar... Je me suis assise, toute seule... J'ai commandé au serveur ma "dernière boisson", je le savais... Je savourais ma victoire, la solution que j'avais trouver, mes derniers instants dans ce monde...
Et puis... J'ai penser... Il me fallait donner une explication à tous, je ne pouvais pas partir comme ça... Alors j'ai pris une feuille, un stylo... J'ai tracer les grandes lignes de ma vie, j'ai remercié mes amis, mes parents, je leur ai dit de ne pas s'inquiéter, d'essayer de me pardonner... Voilà, tout était prêt! Je ne m'étais pas sentie autant bien que ça depuis longtemps... Et puis, tout à coup : "T'as du feu?" Un vieil homme d'une soixantaine d'années s'était assis au bar, à côté de moi. Bien émèché, il commença à me raconter sa vie... De toute façon, je n'étais pas pressée! Et puis, tout à coup :
"Quand j'avais à peu près ton âge, je venais de me faire quitter par ma copine, j'avais des problèmes... J'en avais trop marre, alors j'ai décidé d'en finir. J'ai été sur les voies de chemin de fer, et j'ai commencé à marcher. J'avais mon walkman sur les oreilles, très fort, pour ne pas entendre le train arriver... Je marchais sur la voie de gauche, j'ai entendu un bruit qui se rappochait, j'ai levé la tête et j'ai fait une dernière prière... 3 secondes après, le train m'a passé à côté... Sur la voie de droite!!! C'est depuis ce jour que je sais que les trains roulent à gauche... Je me suis dit que j'étais trop con de pas avoir penser à ça, mais là j'avais peur... Alors je suis rentré chez moi...
Aujourd'hui je me dis heureusement que je l'ai pas fais, je serais plus là pour regretter, mais j'aurais manquer tellement de choses... Et mes enfants, ah c'est tellement beau un enfant! Un jour aussi tu en auras, et là ta vie va vraiment changer!"
Mais qu'est ce qui lui prend de me raconter des choses pareilles? Je le connais pas ce type... Je suis restée à l'écouter parler de la vie qu'il avait failli abandonné... Et puis, il est parti, comme il était venu. Il m'a dit "Bonne chance" et il est sorti. Je suis restée là, appuyée au bar, à penser à cet homme... Et puis mes pieds m'ont porté, jusqu'à la gare, j'ai pris le train, je suis rentrée à la maison... Pourquoi? Je ne sais pas...
Quelques jours plus tard, je suis retournée dans ce bistrot où j'avais l'habitude d'aller. J'ai demandé au serveur qui était cet homme avec qui j'avais discuté si longtemps le lundi soir. Il me répondit qu'il ne l'avait jamais vu, où du moins qu'il n'en avait aucun souvenir. Selon lui, c'était la première fois que cet homme était entré dans ce bistrot. J'ai continué à retourner régulièrement dans ce bistrot, bien décidée à y rencontrer à nouveau cet homme. Je ne l'ai jamais revu...
Je n'ai jamais cru en Dieu, mais aujourd'hui, je crois aux anges...